Elément essentiel d'un crédit immobilier, l'assurance emprunteur était pourtant régie par une pratique bancaire excessivement controversée. Jusqu'à il y a peu, les établissements prêteurs avaient en effet la fâcheuse tendance à imposer presque systématiquement la souscription de leur propre assurance emprunteur à tout client souhaitant contracter un crédit immobilier. Depuis 1986, l'article L122-1 du Code de la Consommation interdit pourtant cette pratique considérée comme une « vente liée ». Le 11 décembre 2001, la loi MURCEF (Mesures Urgentes de Réformes à Caractère Economique et Financier) venait même conforter cette interdiction en stipulant dans son article L 312-1-2 : « Est interdite la vente ou offre de vente de produits ou de prestations de services groupés, sauf lorsque les produits ou prestations de services inclus dans l'offre groupée ne peuvent être achetés individuellement, ou lorsqu'ils sont indissociables ».
Et pourtant les faits sont bels et bien là, souscription de prêt immobilier et souscription d'assurance emprunteur sont régulièrement associées et proposées au client sous la forme d'un « package ». Dans une volonté de promouvoir la protection et l'information de l'emprunteur, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, annonçait le 25 novembre 2008 vouloir entreprendre une vaste réforme de l'assurance emprunteur (réforme également appelée Loi Lagarde).
La fiche d'information assurance emprunteur
Une première mesure préconisée par la Loi Lagarde et destinées à renverser une situation jusque là défavorable à l'emprunteur, a donc progressivement été mise en place : depuis le 1er juillet 2009, la Loi Lagarde oblige les banques à distribuer à leur client souhaitant souscrire un crédit une notice informative au sujet de l'assurance emprunteur.
Si cette fiche d'information instaurée par la loi Lagarde offre à l'usager une meilleure compréhension de l'assurance de prêt, elle permet également de le guider vers le choix d'une assurance emprunteur véritablement adaptée à son profil.
Remplie conjointement par l'usager et l'établissement prêteur, la fiche d'information instaurée par la Loi Lagarde devra aborder, sous la forme d'un questionnaire, les différentes facettes de l'assurance emprunteur.
- Dans un premier temps, l'emprunteur devra définir le type de prêt qu'il souhaite contracter (catégorie de prêt, montant, durée, etc.).
- La loi Lagarde impose d'intégrer au sein de cette fiche informative un court descriptif destiné à rappeler à l'usager chaque garantie pouvant être intégrée à son assurance emprunteur (garantie décès, garantie invalidité, garantie perte d'emploi, etc.). C'est notamment au cours de cette étape que l'usager et l'établissement prêteur devront définir conjointement les besoins en assurance du futur emprunteur (niveaux de couverture, quotité).
- Après avoir pris connaissance du profil et des besoins de l'emprunteur, la banque ou l'organisme prêteur devra, en vertu de la Loi Lagarde, indiquer quelle solution d'assurance de prêt elle compte proposer à l'usager, établissant ainsi un récapitulatif du contrat envisagé (% des quotités, détail des garanties, franchise, etc.).
- Au terme de ces démarches, et après avoir averti l'usager de l'importance de porter un œil attentif sur le futur contrat d'assurance, la loi Lagarde impose à l'établissement concerné de fournir l'exemple d'une offre d'assurance emprunteur tenant compte des indications transmises par le client.
Le libre choix de l'assurance emprunteur
Dès le premier semestre 2010, la loi Lagarde autorisera chaque emprunteur à contracter une assurance de prêt auprès de l'établissement de son choix. Si la loi Murcef dénonce déjà depuis fin 2001 l'association systématique d'un crédit à une offre d'assurance proposée par l'établissement prêteur (contrat groupé ou assurance collective), cette association était bien trop souvent la règle pour pouvoir espérer décrocher un crédit. La loi Lagarde met donc un terme à cette habitude bancaire jugée abusive par bon nombre d'associations en ouvrant l'assurance emprunteur à la concurrence.
En cas de refus de la banque d'accepter l'assurance individuelle d'un éventuel emprunteur, celui-ci devra obligatoirement être notifié par écrit à l'emprunteur (les motivations du refus devant être clairement mentionnées).
Evidemment rien n'oblige une banque à accorder un crédit immobilier à un client. Bon nombre d'associations de consommateurs s'interrogeaient d'ailleurs sur la façon dont les établissements allaient appliquer cette loi Lagarde. N'allaient-ils pas offrir aux souscripteurs de leur propre assurance des conditions et des taux de prêt immobilier plus favorables ? La loi Lagarde anticipe un tel contournement de la réforme en indiquant notamment que « le prêteur ne peut pas modifier les conditions de taux du prêt prévues dans l'offre [...], que celui-ci soit fixe ou variable, en contrepartie de son acceptation en garantie d'un contrat d'assurance autre que le contrat d'assurance de groupe qu'il propose ».
Concrètement, que change la loi Lagarde pour le futur assuré ?
- Dans le cadre d'un contrat d'assurance crédit dit « normal », la loi Lagarde permet au particulier de souscrire son assurance emprunteur auprès de l'assureur de son choix. L'offre ainsi choisie devra toutefois présenter le même niveau de garanties que l'assurance emprunteur proposée par l'établissement prêteur. Si elle élargit donc le panel de possibilités disponibles pour le client, la loi Lagarde complexifie également le parcours du futur assuré.
- Dans le cadre d'un contrat d'assurance crédit dit « risques aggravés », la loi Lagarde ne modifie en rien les diverses offres de garanties. En effet, bien avant l'idée même d'une loi Lagarde réformant l'assurance emprunteur, un particulier présentant un risque défini comme aggravé selon les termes des assureurs (risque aggravé de santé, risque aggravé professionnel, risque aggravé sportif) devait avoir recours à la délégation d'assurance pour garantir son emprunt. Pour un tel profil d'emprunteur la loi Lagarde n'apporte donc rien de neuf si ce n'est le complément de documentation produit par la fiche informative et peut être une éventuelle facilité à voir accepter sa délégation.